POUR DENONCER L’ECHEC DU PROCESSUS DE JUSTICE TRANSITIONNELLE EN TUNISIE.
Une impunité totale continue de recouvrir les violations graves des droits humains perpétrées par les forces de sécurité tunisiennes pendant les décennies de dictature auxquelles la révolution tunisienne était censée avoir mis fin. En 2013, l’État tunisien a adopté la loi organique n°2013-53 relative à l’instauration de la justice transitionnelle et à son organisation. L’Instance Vérité et Dignité (IVD), créé en juin 2014, a été chargée de faire la vérité sur les violations graves des droits humains commis entre juillet 1955 et décembre 2013. L’IVD a achevé son mandat en mai 2019 et transféré plus que 200 dossiers judiciaires aux 13 chambres criminelles spécialisées en justice transitionnelle, mises en place en 2018. Cela fait plus de six ans et demi que les premiers procès se sont ouverts devant les chambres spécialisées. Loin de s’acheminer vers une issue positive, le processus judiciaire est à bout de souffle, victime d’obstructions manifestes de plus en plus assumées par les autorités qui ne cachent pas leur volonté d’en finir avec ce processus de justice. Les conséquences de l’échec du processus de justice transitionnelle sont graves. L’État tunisien témoigne ainsi de son incapacité à établir un véritable État de droit, désireux et capable de prévenir et lutter contre les violations graves des droits humains et notamment la torture et les mauvais traitements. Les effets se font sentir quotidiennement, avec une intensité grandissante. A mesure que la justice transitionnelle s’effondre, la violence institutionnelle s’intensifie. L’OMCT se tient aux côtés de six victimes en attente de justice devant les chambres spécialisées en justice transitionnelle pour dénoncer la stagnation du processus de justice, ses causes et ses conséquences délétères pour la société tunisienne dans son ensemble. Les plaignants en appellent au Comité contre la torture pour rappeler à l’État tunisien ses obligations fondamentale en matière de lutte contre les fléaux que constituent le phénomène tortionnaire et l’impunité.