Un activiste torturé jusqu’aux aveux
Hafid, 37 ans, Centre-Ouest de la Tunisie
En janvier 2021, Mohamed, un activiste, a été arrêté chez lui en pleine nuit, sans mandat. Violemment agressé au moment de son arrestation, il a ensuite été torturé au poste de police et forcé de signer des procès-verbaux l’accusant notamment d’incitation à participer à des manifestations. Comme lui, des centaines de jeunes tunisiens ont été arrêtés en janvier en réponse à la vague de protestation qui a secoué le pays. Beaucoup ont été violentés pendant leur arrestation et leur garde à vue sans assistance d’un avocat, puis placés en détention provisoire et condamnés sur la base de procès-verbaux falsifiés ou pour des infractions mineures.
A partir du 14 janvier 2021, des manifestations se sont multipliées dans le pays pour dénoncer la marginalisation économique et politique de la jeunesse tunisienne ainsi que les violences policières et l’impunité qui les recouvre. Les protestations ont été sévèrement réprimées. Près de 1600 manifestants présumés ont été arrêtés parmi lesquels Mohamed qui n’a pourtant pas participé aux manifestations mais est un activiste.
Une nuit de janvier, une dizaine de policier ont fait irruption au domicile de Hafid. Ils ont enfoncé sa porte, l’ont appréhendé, menotté, bloqué contre le mur et roué de coups de poings. Il a même reçu un coup de bombe lacrymogène sur le visage. Puis les agents l’ont trainé jusqu’à une voiture de police et frappé sur la route vers le poste de police.
Là-bas, Hafid a été roué de coups surtout au niveau du visage et les agents l’ont contraint à leur donner l’accès à ses comptes de réseaux sociaux sur son téléphone. Puis deux agents l’ont dénudé et photographié dans le but de l’humilier. Au milieu de la nuit, on lui a fait signer des procès-verbaux qu’il n’a pas pu lire et dont il a découvert ensuite qu’ils l’accusaient de rébellion, de diffamation et d’incitation à participer à des manifestations. A aucun moment il n’a pu prévenir sa famille de son arrestation, ni contacter un avocat.
Hafid a ensuite été transféré au district où il a passé trois jours en garde à vue puis il a été présenté à un procureur. Grâce aux avocats présents ce jour-là, le procureur a pris note des allégations et des traces de violence présentées par le détenu et a ordonné sa libération. Hafid a porté plainte mais, six mois plus tard, il n’a toujours pas été entendu dans le cadre de l’enquête.
Des centaines d’autres personnes arrêtées en janvier dans le contexte du mouvement de protestation ont été confrontées à des procureurs complices de la police qui ont ordonné leur placement en détention préventive, parfois sans même les voir, et sans tenir compte des allégations de violence et autres violations systématiques par la police des règles entourant la garde à vue.