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Agressée et poursuivie en raison de son identité de genre

Maya, 22 ans, Tunis

Maya est un transgenre. Elle a été arrêtée dans la nuit du 11 au 12 décembre 2022. Elle se trouvait dans un appartement de la ville de Hammamet, en compagnie d’autres personnes lorsque des policiers de "la brigade de l'unité spécialisée pour la prévention sociale" (autrement nommée police des mœurs) de Tunis a perquisitionné le domicile, sans mandat. Ils espéraient prendre les quatre occupants en flagrant délit de relation homosexuelle, une pratique sanctionnée par l’article 230 du Code pénal tunisien. Pour justifier la descente de police, ils ont invoqué une dénonciation effectuée par un individu anonyme.

Aucun flagrant délit d’homosexualité n’a été pourtant constaté, comme en atteste le premier procès-verbal établi par la police. Les personnes présentes dans le logement ont malgré tout été arrêtées et placées en garde à vue, au centre de garde à vue à Bouchoucha.

Maya a été frappée et humiliés au cours de l’arrestation puis au cours de la garde à vue. Elle a été contrainte de signer des aveux dans lesquels elle reconnait entretenir une relation homosexuelle. Elle n’a pas été notifiée de son droit à un avocat et à une visite médicale, en violation de l’article 13bis du code de procédure pénal tunisien.

A l’issue de sa garde à vue, Maya a été présentée devant le procureur de Grombalia. Elle a expliqué qu’elle n’avait pas pu lire le procès-verbal de garde à vue qu’elle avait dû signer sous la contrainte. A l’occasion de son audience une semaine après son arrestation, son avocat a pu constater des traces sur le cou.

Maya expliquera plus tard à son avocat que les policiers de Gorjani, au moment de l’interrogatoire, l'ont déshabillée et harcelée sexuellement. En dépit des allégations de violence et de la dénonciation des violations des garanties procédurales pendant la garde à vue, le procureur a ordonné le placement de Maya en détention préventive à la prison civile pour hommes de Mornag. Là-bas, Maya a eu les cheveux rasés de force et a été humiliée par des gardiens.

Le 21 décembre, Maya a comparu devant la chambre correctionnelle du tribunal de Grombalia. En dépit de l’absence de preuve, malgré un procès-verbal de la police disant qu’il n’y avait pas de flagrant délit et malgré les déclarations de Maya concernant la signature d’aveux forcés, la juge l’a condamnée à trois ans d’emprisonnement ferme sur le fondement de l’article 230 du code pénal tunisien réprimant la sodomie. Il s’agit de la peine maximale encourue pour ce délit.

Sa peine a été réduite en appel et Maya a été libérée. Damj et SANAD Elhaq l’accompagnent aujourd’hui dans sa quête de justice. Les deux organisations ont notamment effectué une saisine de plusieurs procédures spéciales des Nations unies.

Cette affaire s’inscrit dans le cadre d’une politique de répression de l’homosexualité en Tunisie. Les membres de la communauté LGBTIQ++ subissent un harcèlement policier et judiciaire systémique, ce qui fragilise davantage les victimes qui refusent de porter plainte, de peur d’être poursuivies sur le fondement de l’article 230 du Code pénal criminalisant l’homosexualité.